Les sagas islandaises sont des
récits du Moyen-Âge écrit
en prose qui relatent les aventures des premiers
colons de l'Islande. C'est un genre littéraire
tout à fait à part où se
mèlent histoire vrai et légende.
Les personnages principaux ont réellement
existés mais le récit de leurs exploits
est enjolivé, agrémenté d'anecdotes
fictives, d'histoires de sorcellerie et de revenants.
Ces histoires furent transmises
oralement pendant près de trois siècles
jusqu'à ce que des érudits, probablement
membres du clergé, les retranscrivent par
écrit au XIIIe siècle. Les sagas
pallient l'absence de vestiges archéologiques
en Islande et sont aujourd'hui la principale source
de recherche historique.
Arni Magnusson (1663-1730) consacra
sa vie et sa fortune à rechercher, rassembler
et sauver ces précieux manuscrits de l'oubli.
Ils constituent un patrimoine culturel et historique
inestimable. Une partie fut cependant détruite
dans l'incendie qui ravagea Copenhagen en 1728.
Les 1800 manuscripts épargnés ne
furent restitués aux islandais par le Danemark
qu'entre 1971 et 1997. Ils sont aujourd'hui conservés
et étudiés à l'Institut Arni
Magnusson de Reykjavik.
Il y aurait tant à dire
sur les sagas ... Tout d'abord, elles commencent
toujours par de longues énumérations
généalogiques pour bien situer les
personnages et comprendre les liens parentaux
qui unissent les différents protagonistes.
Les islandais adorent se référer
à d'illustres ancêtres et les premiers
colons descendaient tous de grands guerriers norvégiens.
Ensuite, l'histoire est replacée dans son
contexte en commençant le récit
par les faits anodins qui sont à l'origine
de tout. Le héros principal n'apparaît
parfois que bien plus tard, une fois le décor
planté.
Il y a souvent deux héros,
un blond, grand, beau, charismatique, aimé
de tous et un autre, ami ou frère, noiraud,
taciturne, fort comme un ours mais aussi mal léché
bref très difficile de caractère.
Par définition, une saga relate les péripéties
de plusieurs familles sur plusieurs générations.
C'est bien sûr le cas.
Une des caractéristiques
des sagas islandaises est l'absence de psychologie,
on ne s'étend pas sur ce que pensent ou
ressentent les personnages. C'est une succession
d'actions, souvent violentes, qui se succèdent
à un rythme effréné : un
jeu ou un combat de chevaux qui tourne mal, une
insulte, un meurtre, un procès, un paiement
de compensation, une vengeance sanglante, une
embuscade, un massacre, un nouveau procès,
une escalade de la violence jusqu'au dénouement
final, la mort, l'exil ou la réconciliation.
La notion de Destin, fondamentale
chez les vikings, est bien présente dans
les sagas. Les héros connaissent leur destinée.
Ils en sont informés à l'avance
par des rêves, visions, prémonitions
ou prédictions. Même si l'issue doit
être fatale, ils ne tentent pas d'y échapper.
Au contraire, ils se font un point d'honneur à
l'affronter avec courage et bravoure car l'honneur
et la réputation d'un homme sont les seules
valeurs qui persistent après sa mort.
Ces récits sont à
lire au second degré lorsque l'on a parcouru
et aimé les paysages islandais. Ils deviennent
alors totalement savoureux. De plus, ils contiennent
une mine de renseignements sur les valeurs de
l'époque, l'organisation sociale, le mode
de vie, la nourriture, les fêtes et beuveries,
les traditions, les us et coutumes, les lois,
les procès, les armes, les vêtements,
les moyens de transport, l'agencement des fermes,
les chevaux, les bateaux, la conclusion des mariages,
l'éducation des enfants, les légendes
et superstitions, le statut de la femme...
On y découvre que les
femmes islandaises n'étaient pas plus tendres
que leurs hommes. Ce sont souvent elles qui exhortaient
leurs maris, pères ou fils à la
vengeance. On est bien loin de l'image du sexe
faible. De plus elles possédaient un droit
de propriété, exerçaient
une totale autorité sur l'organisation
interne de la maison et pouvaient même divorcer
si leurs époux se révèlaient
piètres amants ou violents.
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