Pour suivre le déroulement
des événements depuis le début,
consultez les pages 1,
2, 3,
4, 5
et 6.
Après 15 jours d'activité sismique
intense, le Bardarbunga est entré en éruption
fin août. Une fissure effusive s'est ouverte
au nord-est du volcan dans un ancien champ de
lave nommé Holuhraun. Le magma migre depuis
la chambre magmatique du volcan vers l'Holuhraun
via un dyke de 45 km de long. Le vidage du réservoir
entraîne l'effondrement de la caldera sur
elle-même si bien que l'activité
sismique reste incroyablement élevée.
Depuis deux mois, les bouches
éruptives ont vomi la plus grande quantité
de lave émise en Islande depuis le XVIIIe
siècle. L'activité s'est resserrée
autour d'un seul cratère, Baugur, où
bouillonne un immense lac de lave à 1200°C.
Il libère un flot de lave continu et des
taux élevés de dioxyde de soufre
qui polluent l'air. Le champ de lave s'agrandit
toujours.
--> Dimanche 2
novembre 2014
Petit bilan après 2 mois d'éruption.
Les conditions restent inchangées en ce
qui concerne les séismes, l'effondrement
de la caldera et la pollution. Selon un tweet
de l'Univ. of Iceland posté le 31 octobre,
la lave couvre plus de 67 km² et occupe un
volume de 1 km³.
La chaleur du fond rocheux du
Bardarbunga couvert par 800 mètres de glace
est en hausse. L'énergie géothermique
représente quelques centaines de megawatts
et fait fondre la glace. L'eau fondue est estimée
à environ 2 m³ par seconde et se traduit
en surface par le creusement des trois dépressions
ou chaudrons observés dans la calotte glaciaire.
L'eau s'évacue dans la Skjálfandafljót
(rivière qui alimente la cascade Aldeyjarfoss)
et la Jökulsá á Fjöllum.
La quantité est cependant trop faible pour
influencer le débit total de ces deux rivières.
Aucune crue n'est à l'ordre du jour.
Un article intéressant
sur l'émission de gaz a été
publié en anglais dans le magazine Nature.
Il parle du projet FUTUREVOLC qui étudiait
comment le magma fait son chemin des profondeurs
de la Terre vers la surface quand l'éruption
a débuté. Ça tombait à
pic pour les recherches !
Deux types de spectrophotomètres
ont été placés à Holuhraun
pour monitorer les gaz. L'un mesure les concentrations
de SO2 dans le panache volcanique en calculant
combien il absorbe de lumière à
une longueur d'onde particulière. L'autre
scanne simultanément plusieurs gaz. Les
deux instruments dépendent de la lumière
du jour pour faire leurs mesures et l'obscurité
croissante de l'hiver nordique va limiter leur
utilisation. De plus l'hiver rend l'accès
au site de plus en plus difficile. Les chercheurs
vont malgré tout essayer de récolter
autant de mesures que possible et les comparer
avec les estimations grossières fournies
par les satellites.
pollution record à Akureyri le 30 octobre 2014 - Source: ust.is
Le panache volcanique n'est pas
assez élevé pour pénétrer
la stratosphère et causer de graves perturbations
climatiques. Mais les millions de tonnes de dioxyde
de soufre émis sont sans précédent
et les islandais sont aux premières loges
pour tester les effets d'une exposition prolongée
au gaz toxique. Les taux élevés
enregistrés ces derniers jours dans les
zones habitées s'expliquent par les conditions
météorologiques hivernales. A cause
de vents faibles et du froid, le SO2 a stagné
et s'est accumulé au niveau du sol. La
tempête qui balaie l'Islande ce week-end
avec des vents de 70 km/h devrait améliorer
la qualité de l'air.
Ci-dessous, le profil assez étonnant
de l'activité sismique du Bardarbunga ces dernières
48 heures. Il n'y a eu quasiment aucune secousse
entre 2 et 4 de magnitude. C'est du tout ou rien.
Le 31 octobre, l'IMO a fait le bilan du nombre
de séismes enregistrés dans la région
du Vatnajokull depuis le 16 août 2014. En
le comparant au relevé du 7 octobre, on
remarque la hausse des fortes secousses dans la
caldera alors qu'il n'y a plus eu aucun séisme
supérieur à 3 dans l'intrusion ou
les volcans avoisinants. En 24 jours, le nombre
de séismes autour de la caldera a doublé
(1800 à 3550) par rapport aux 52 jours
précédents et surtout la tranche
entre 4 et 5 de magnitude (108 à 219).
activité sismique du Barbarbunga les 1 et 2 novembre 2014 - Source: IMO
nombre de séismes enregistrés depuis le 16 août 2014 - Source: IMO
Si l'éruption actuelle
puise le magma dans les profondeurs de la croûte
terrestre comme le suggèrent le volume,
la température (1200°C) et la composition
de la lave, elle pourrait bien durer des mois
voire des années. La persistance et la
violence des séismes au niveau de la caldera
du Bardarbunga inquiètent les scientifiques.
L'éruption ne ressemble à aucune
autre. Ils n'ont aucune référence
pour prévoir l'évolution de la situation
et certains ont le pressentiment que ce n'est
que le début d'un événement
géologique majeur. Pourvu qu'ils se trompent...
--> Dimanche 9
novembre 2014
L'activité sismique et
volcanique est similaire aux semaines précédentes.
La lave couvre maintenant 70 km². Les gaz
toxiques (SO2) continuent de dériver vers
les zones habitées au gré des vents.
Le 4 novembre, le port d'Husavik a enregistré
un pic de 4800 µg/m³. L'affaissement
de la caldera a atteint une profondeur totale
de 44 mètres. Comme la caldera est immense,
la dépression est imperceptible à
l'oeil nu bien qu'elle représente un volume
de 1,1 à 1,2 km³.
superficie de la coulée de lave le 8 novembre - IES
--> Dimanche 16
novembre 2014
Aux dernières nouvelles,
le champ de lave recouvrait 71,9 km². Le
cratère Baugur s'élève à
près de 100 mètres de hauteur et
contient un lac de lave bouillonnant de 400 mètres
de long sur 100 mètres de large. Même
s'il n'y a plus de fontaine de lave, les bulles
qui explosent à la surface du lac projettent
des lambeaux incandescents bien au-dessus des
parois. Un torrent de lave s'écoule à
grande vitesse par l'échancrure située
au nord du cratère. Le champ de lave continue
de s'étendre vers le sud.
superficie de la coulée de lave le 14 novembre - IES
Le 11 novembre vers midi, ceux
qui observaient l'affaissement de la caldera sur
le graphique de l'IMO ont pu s'étonner
voire s'alarmer d'une hausse brutale de 1,5 mètres.
Fausse alerte, ce n'était pas le Bardarbunga
qui entrait en éruption mais les scientifiques
qui surélevaient la station GPS ensevelie
sous la neige. Ils ont travaillé jusqu'à
minuit. Les mesures sont redevenues fiables le
lendemain matin. Depuis, le graphique a été
corrigé pour compenser cette différence
de 1,5 m. On remarque une légère
diminution de l'affaissement. Désormais,
il est de moins d'un mètre tous les 3 jours.
Les fermiers de la région
de Höfn ont trouvé un grand nombre
de mulots morts dans les champs. Rappelez-vous,
c'est dans cette région que le taux de
SO2 est monté jusqu'à 21.000 µg/m³
le 26 octobre. Les mulots semblent être
morts subitement pendant qu'ils cherchaient de
la nourriture dehors. On suppose qu'ils sont morts
empoisonnés par le SO2 qui a stagné
au raz du sol ou par quelque chose qu'ils ont
mangé. Il est malheureusement trop tard
pour pratiquer une autopsie.
L'IMO prélève des
échantillons d'eau de pluie en divers points
de l'Islande. Depuis septembre, 40% des échantillons
se sont révélés plus acide
que la normale, notamment dans la région
de la capitale, à Reykjahlid et à
Höfn, les zones les plus touchées
par les gaz volcaniques. Heureusement seul 1%
ont un pH inférieur à 4 et 60% des
prélèvements sont non pollués.
Les pluies acides n'ont pas d'impact direct sur
la santé humaine mais brûlent la
végétation et peuvent à la
longue provoquer la mort des poissons, menacer
le bien-être des animaux, corroder le métal
et endommager les lignes électriques.
Quant à la neige tombée
aux alentours du site de l'éruption, devinez
quoi ?! Elle est acide. Son pH est de 3,2 alors
qu'en temps normal (sans éruption) la moyenne
est de 5,6. Le pH est une échelle qui mesure
l'acidité des solutions aqueuses. Elle
s'étale de 0 à 14. La neutralité
correspond à 7. Plus on descend vers 0,
plus la solution est acide. Plus on monte vers
14, plus elle est basique. Les deux extrêmes
sont aussi corrosifs l'un que l'autre. Pas de
panique toutefois, notre estomac a un pH de 1,5
et le coca cola ou les jus de fruits sont encore
plus acides que la pluie ou la neige contaminée
par la transformation du dioxyde de soufre en
acide sulfurique (dilué !!!).
Cela pourrait poser problème
lors de la débacle printanière,
quand la neige fondra en libérant d'un
coup de grandes concentrations d'acide. Cependant
si la contamination est limitée aux alentours
du site de l'éruption, elle sera diluée
par les eaux de fonte du Vatnajokull.
On a enfin des chiffres plus
précis sur la quantité de gaz volcaniques
émis par le cratère. Selon Jónas
Elíasson, un ingénieur de l'Université
d'Islande qui monitore les gaz, l'éruption
libère environ 450 kg de SO2 chaque seconde
soit 40.000 to 60.000 tonnes par jour. En absence
de vent, le dioxyde de soufre s'accumule près
du sol en un énorme nuage de 30 à
60 km de diamètre susceptible de dériver
vers les régions habitées lorsque
le vent recommence à souffler. Ceci explique
les plus hautes concentrations mesurées
ces derniers temps. Les islandais en viennent
à souhaiter qu'il pleuve et qu'il vente.
Ça tombe bien, les tempêtes sont
fréquentes en cette saison.
--> Mardi 18 novembre 2014
Une belle vidéo tournée
le 17 novembre vient d'être diffusée
par la télévision RUV.
Quelques chiffres en pagaille que je n'ai pas
eu l'occasion de mentionner précédemment
:
1 kilomètre cube = 1 milliard
de mètres cube = 1000 millions de mètres
cube.
Depuis le 6 octobre, le débit
de lave est stable et d'environ 100 m³
par seconde.
La lave sort à 1200°C soit
200°C plus chaude que dans la plupart des
éruptions en Islande.
La pollution à l'intérieur
des habitations représente 10% de celle
présente à l'extérieur.
L'éruption du Laki en 1783
a vomi 14 km³ de lave couvrant une surface
de 565 km² et libéré environ
120 millions de tonnes de SO2 en 8 mois. Les
coulées atteignirent 60 km de long, les
fontaines de lave 800 à 1400 mètres
de haut. 115 cratères s'alignaient le
long d'une fissure de 27 km. Les cendres fluorées
retombèrent jusqu'au Royaume-Uni. Bref,
il n'y a aucune comparaison possible avec l'éruption
actuellement en cours dans l'Holuhraun bien
qu'elle soit colossale.
Ceux qui sont allés en
Islande connaissent le lac Myvatn.
Vous vous souvenez comme il est grand? 36,5 km²
pour être exact. Et bien le champ de lave
de l'Holuhraun est deux fois plus étendu.
WOW! Et le lac Thingvallavatn, vous l'avez vu
en visitant le site de Thingvellir?
Il est si immense qu'on n'en voit pas le bout.
Lui fait 83 km². D'ici 3 semaines, le champ
de lave sera aussi vaste que le plus grand lac
naturel d'Islande.
copies d'écran des webcams Mila 1 et 2 ce soir au coucher du soleil
--> Mardi 25 novembre 2014
Peu d'évolution depuis
une semaine. Superficie de la lave : 72,5 km².
Le champ de lave croît en épaisseur
mais celle-ci n'a toujours pas été
mesurée avec précision. Le taux
de pollution a été plus supportable
cette semaine. La qualité de l'air était
décrite comme bonne à acceptable
dans les zones habitées.
L'éruption visible sur
les webcams est toujours bien active bien que
le débit de la lave soit plus fluctuant
et moins abondant qu'à la mi-septembre.
Pour ceux qui auraient raté le spectacle,
Paul
Terlien poste régulièrement
sur Youtube des timelapses
des images de la webcam en accéléré
sur fond de musique. Ces vidéos sont hypnotisantes.
Alors que les séismes
supérieurs à 5 de magnitude commençaient
à s'espacer de plusieurs jours (plus rien
depuis le 16), il y en a eu deux violents les
23 et 24 novembre (5,1 et 5,4). Celui de lundi
a été ressenti à Akureyri.
Avec le recul, les scientifiques ont remarqué
qu'après un gros séisme dans la
caldera, les secousses dans le dyke s'intensifiaient
pendant quelques heures alors que la caldera redevenait
plus calme. L'activité sismique d'aujourd'hui
est plus faible que les jours précédents
mais ça ne signifie rien. Cette tendance
a déjà été observée
plusieurs fois depuis le début de l'éruption.
Un nouveau sismographe a été
installé le 11 novembre sur le volcan Bardarbunga.
Ses premières données révèlent
que le magma est beaucoup plus proche de la surface
que les scientifiques ne le pensaient. Les tremblements
de terre ont lieu dans les 3 derniers kilomètres
de l'écorce terrestre. L'épaisseur
de la calotte glaciaire dans la caldera semble
également plus fine que supposé.
Par contre, le magma qui alimente l'éruption
dans l'Holuhraun provient d'une profondeur supérieure
à 9 km. Le système magmatique du
Bardarbunga s'avère donc plus complexe
qu'il n'y paraît.
La station GPS qui mesure l'effondrement
de la caldera ne transmet plus de données
depuis le 22 novembre. Un problème de communication
probablement dû au gel. Dommage ...
Parmi les nouvelles images publiées
cette semaine, il y a l'image thermique du cratère
Baugur où l'on voit des coulées
encore chaudes sur les flancs du cône. Ce
sont des canaux d'écoulement désaffectés
par où la lave a débordé.
Image thermique (FLIR) du cratère le 18 novembre vu depuis l'ouest (nord à gauche et sud à droite). Convection thermique plus forte dans la partie nord. Température de l'ordre de 1147 à 1188°C. Source : Institute of Earth Sciences
J'ai aussi découvert avec
plaisir les photos de Daði
Harðarson. Elles datent des premiers jours
de l'éruption, le 6 septembre, histoire
de se rappeler le temps où l'Holuhraun
ressemblait au Mordor du Seigneur des Anneaux.
Dantesque ! Et enfin, le sublime survol
nocturne du reporter islandais Ómar
Ragnarsson satisfait des conditions idéales
de prises de vue. Travaillant pour la télévision
RUV, il a déjà eu l'occasion de
survoler l'Holuhraun 6 fois en 4 mois. Petit veinard
!
--> Mercredi 17 décembre 2014
Hier cela faisait exactement
4 mois que le Bardarbunga s'est réveillé.
Quatre mois d'activité sismique intense.
Une période d'agitation parmi les plus
longues jamais enregistrées pour un volcan.
L'éruption dans l'Holuhraun quant à
elle a fêté ses 100 jours le 9 décembre.
C'est l'heure des bilans maintenant qu'il y a
suffisamment de recul pour voir s'afficher certaines
tendances. Et elles indiquent toutes un affaiblissement
graduel.
Bien que cela ne se remarque
pas d'un jour à l'autre, l'émission
de lave qui s'est montrée exceptionnellement
stable a cependant diminué lentement. Au
cours du mois de novembre, le débit de
la lave est passée sous la barre des 100
mètres cube par seconde.
La force et le nombre de tremblements
de terre au niveau du dyke ont fortement diminué
après l'ouverture de la fissure dans l'Holuhraun
le 31 août. Ils sont actuellement 10.000
fois moins puissants que pendant la formation
et la progression du dyke. On y détecte
encore des secousses mais elles sont peu nombreuses
(~10 par jour) et ne dépassent pas 2 de
magnitude.
récapitulatif de 4 mois d'activité sismique depuis le 16 août 2014 - Source : IMO En haut, l'activité sismique du dyke. En bas, celle de la caldera. À gauche, l'énergie totale libérée chaque semaine. À droite, le nombre de séismes par semaine classés par magnitude. La ligne rouge marque le début de l'éruption.
Par contre, au niveau de la caldera
du Bardarbunga, la diminution est moins évidente
bien que réelle. L'activité sismique
a culminé la semaine précédant
l'éruption puis est restée élevée
pendant plusieurs semaines avant de décliner
lentement. Les séismes supérieurs
à 5 ne sont plus quotidiens. Il s'est écoulé
10 jours entre le dernier du 15 décembre
(5,4) et le précédent qui datait
du 5 décembre (5,1). Rien que pour contredire
la tendance, il vient d'y en avoir un de magnitude
5,3 aujourd'hui 17 décembre à 14h00.
Les précédents remontaient aux 2
décembre (5,4), 1er décembre (5,2)
et 28 novembre (5,1). L'énergie libérée
n'a diminué que d'un facteur 5 voire 10
au maximum et les événements sismiques
de magnitude entre 3 et 5 sont toujours nombreux.
Actuellement, le nombre de secousses est de 60
à 70 par jour.
Quant à l'effondrement
de la caldera, il s'est ralenti également.
Dans les premiers jours où le phénomène
a été constaté, l'affaissement
était de 80 à 90 cm par jour (mesures
effectuées par l'avion des Gardes-Côtes).
Après l'installation d'une station GPS
dans la caldera le 12 septembre, l'enregistrement
en temps réel a montré un ralentissement
progressif de 50 cm à 25 cm par jour. Lors
du dernier relevé par avion le 26 novembre,
l'affaissement de la caldera était de 50
mètres au total ce qui représente
un volume de 1,4 km³. Notez que l'affaissement
de la caldera épouse la forme d'un bol
et que seul le centre de la caldera s'est enfoncé
de 50 mètres. La diminution d'altitude
est plus faible sur les bords.
Sur le graphique du bas, l'axe vertical a été exagéré 6x et sur celui du haut, la différence de hauteur a été multipliée par 120, histoire de distinguer clairement les résultats des différents vols de surveillance. Source : Institute of Earth Sciences
Le taux d'effondrement dans le
centre de la caldera a diminué lentement
mais la zone effondrée s'est élargie.
Le changement de volume depuis la mesure du 4
novembre correspond à un débit de magma
de 130 m³/s. C'est moins que le premier mois
où le débit était estimé
à environ 200 m³/s. Notez que selon
un autre rapport, le débit de lave a été
estimé entre 60 et 100 m³/sec au cours
du mois de novembre. Cette divergence qui passe
du simple au double pour la même période
s'explique peut-être par la tuyauterie complexe
du Bardarbunga.
En effet, selon toute vraissemblance,
il y a au moins deux chambres magmatiques superposées
sous le Bardarbunga. L'éruption est alimentée
par une poche de magma située entre 9 et
20 km de profondeur alors que la caldera s'effondre
sur elle-même parce que la chambre magmatique
superficielle située à moins de
3 km de profondeur se vidange par le bas. Rajoutez
à cela que le dyke renferme un volume d'environ
0,5 km³ de magma et vous aurez une vision
assez juste de la complexité du système
volcanique du Bardarbunga.
Depuis le 22 novembre, le monitoring
est interrompu, non pas à cause de l'antenne
gelée comme on l'avait cru au début
mais parce que l'affaissement de la caldera est
tel que la station GPS est passée sous
la crête et est par conséquent hors
de vue de l'antenne relai, indispensable à
la transmission des données, située
au sommet de Kverkfjöll. Le temps est trop
mauvais pour y remédier pour l'instant.
L'Islande a subi plusieurs tempêtes et de
fortes chutes de neige ces derniers jours.
Voyons maintenant comment a évolué
le champ de lave depuis ma dernière mise
à jour.
image thermique prise par Landsat 8 le 25 novembre - Source : Institute of Earth Sciences
Le 25 novembre, l'étendue
de la lave était de 74 km². L'activité
était pulsatoire. Le panache volcanique
connaissait des fluctuations tandis que la lave
était expulsée de la fissure par
vagues fréquentes durant 2 à 3 minutes
toutes les 5 à 10 minutes, causant des
gonflements soudains le long du canal de lave.
Ces sursauts semblaient liés aux explosions
de bulles à l'extrêmité nord
du lac de lave. D'après l'image satellite,
on voit la lave s'étaler vers l'est sur
les coulées précédentes et
à contre-pente vers le sud, le champ de
lave faisant obstacle à l'écoulement
dans le sens de la pente (nord-est). Le débit
était de 60 à 100 m³/sec.
image thermique prise par satellite le 1er décembre - Source : Institute of Earth Sciences
L'image thermique du 1er décembre
montre une activité magmatique importante
et une réactivation du front nord où
une langue de lave émergeant de la bordure
du champ de lave s'est étendue d'environ
450 mètres vers le nord-est en 24 heures.
Un bras de la rivière de lave bifurque
maintenant vers le nord. Le front sud est toujours
bien actif. Voir les images satellites du 2
décembre à midi et
vers 22h.
Les scientifiques sur le terrain
les 2 et 4 décembre ont observé
que l'activité volcanique était
pulsatoire et que la température de la
lave qui s'épanchait dans les plaines de
sable au nord de Nornahraun (et oui, ce nom semble
définitivement adopté par les scientifiques)
était plus froide que précédemment.
Le panache floconneux au dessus du site indique
que la convection thermique est moins intense.
Il est plus petit et parfois absent.
comparaison de la surface de Nornahraun avec les éruptions du Laki et de l'Eldja - IES
Le 100e jour de l'éruption,
l'Institut des Sciences de la Terre a diffusé
un graphique superposant la surface de Nornahraun
à celles des deux plus grosses éruptions
qu'ait connu l'Islande, celle du Laki en 1783
et celle de l'Eldgja en 934, histoire de montrer
que l'éruption actuelle n'a aucune commune
mesure avec les précédentes. Même
si la quantité de SO2 libérée
jusqu'à présent est d'environ 3,5
millions de tonnes (en considérant le taux
moyen) voire 11,2 millions de tonnes au maximum
en se basant sur les pics, c'est 5 à 15
fois moins que le Laki qui selon les estimations
aurait libéré dans l'atmosphère
122 millions de tonnes en 8 mois soit 51 Mt en
100 jours.
L'IMO a également publié
une carte montrant l'extension progressive du
champ de lave jusqu'au 14 novembre.
extension progressive de Nornahraun du 29/8 au 14/11 - IMO
Depuis le 10 décembre,
la lave se dirige de nouveau vers le nord-est
et notamment vers l'îlot central épargné
par le deuxième coulée de lave parallèle
à la première. L'image
thermique de Landsat 8 prise le 11 décembre
révèle la présence d'une
langue de lave incandescente à l'est de
l'îlot qui commence à se faire engloutir.
superficie de la coulée de lave le 12 décembre - IES
Le 12 décembre, c'en était
fait de la parcelle de terre intacte. Elle avait
disparu, submergée par l'avancée
de la lave. L'image thermique de Landsat 8 montre
également que la lave coule maintenant
principalement à l'intérieur de
tunnels fermés qui s'ouvrent près
des bords du champ de lave. Refroidissant moins
vite, la lave peut à nouveau progresser
plus loin. La superficie totale de Nornahraun
est de 78,6 km².